Agents pénitenciaires tués : la prison de Carcassonne bloquée par des agents endeuillés

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  • Ils étaient une trentaine d’agents pénitentiaires à s’être mobilisés ce mercredi 15 mai devant la maison d’arrêt de Carcassonne.
    Ils étaient une trentaine d’agents pénitentiaires à s’être mobilisés ce mercredi 15 mai devant la maison d’arrêt de Carcassonne. photo nathalie amen-vals
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Driss Chaït

l'essentiel Les salariés de la maison d’arrêt de Carcassonne ont répondu à l’appel de l’intersyndicale au lendemain de la mort de deux agents lors de l’attaque de leur convoi, dans l’Eure. Le site était hier bloqué depuis 6 heures du matin. Les surveillants pénitentiaires se disent à bout de souffle et espèrent être entendus par le gouvernement.

"Colère", "désarroi", "tristesse infinie". Ce mercredi 15 mai, le monde pénitencier était en deuil. À bout de souffle, il voulait manifester sa détresse jusqu’aux plus hautes instances. Pour ce faire, comme dans beaucoup de villes françaises, la maison d’arrêt de Carcassonne était bloquée depuis les premières lueurs de l’aube mercredi matin. Les surveillants pénitentiaires, quasiment tous, se sont réunis devant l’établissement pour manifester leur mécontentement au lendemain de la mort de deux de leurs collègues. Ce mardi 14 mai, deux agents pénitentiaires ont été tués et trois autres ont été gravement blessés au péage d’Incarville, dans l’Eure, lors de l’attaque de leur fourgon qui transportait un trafiquant de stupéfiants qui est parvenu à prendre la fuite. Le pronostic vital de deux d’entre eux reste engagé. Mohamed Amra, surnommé "La Mouche", était emprisonné à la maison d’arrêt d’Évreux pour vol avec effraction et association de malfaiteurs.

Un drame qui a plongé l’ensemble du personnel pénitentiaire dans un profond désarroi. Ainsi, au lendemain des faits, il n’y avait ni entrées, ni sorties, ni parloirs, ni promenade dans la prison. Un mouvement qui pourrait durer dans le temps si leurs doléances ne sont pas entendues par le gouvernement.

Pierre Journet, surveillant pénitentiaire et délégué syndical UFAP-UNSA Justice, tirait la sonnette d’alarme : "Nous sommes écœurés. Ce n’est pas normal que des collègues partent travailler le matin et ne rentrent pas chez eux le soir. Nous sommes en colère. Ça fait des années qu’on dit qu’il va se passer des choses. Nous n’arrêtons pas d’alarmer et nous ne sommes pas pris au sérieux. Aujourd’hui, on voit le résultat. La violence est montée d’un grade. On avait déjà vécu des gros coups durs mais là, c’est l’enfer".

L’ensemble des agents pénitentiaires attend des actes concrets du gouvernement. Qu’il prenne la "véritable mesure" de la situation. "À Carcassonne par exemple, on a 60 places et on a 140 détenus. On est obligé de les entasser à trois voire quatre par cellule. Le boulot devient de plus en plus compliqué. C’est de plus en plus tendu. Quand on a des bagarres en cellules, ce qui est assez récurrent, il nous est impossible de les déplacer. Nous n’avons plus de place nulle part. Ça devient ingérable. Il faut de nouvelles structures, des structures adaptées, du matériel adapté et davantage de personnel. C’est indispensable. Mardi, si nos collègues avaient eu un véhicule blindé au lieu d’une simple camionnette, ils ne seraient peut-être pas morts", faisait valoir le délégué syndical, ému qu’une passante se soit arrêtée pour leur faire part de son soutien.

Virginie est surveillante pénitentiaire. En 24 ans de métier, elle a inévitablement vu la profession évoluer : "Quand je suis rentrée dans ce milieu, il n’y avait pas toutes ces missions comme les extractions judiciaires. On est de plus en plus à l’extérieur pour des extractions. Nos dirigeants devraient revoir un peu la sécurité des personnels, en réduisant toutes ces extractions qui sont bien souvent inutiles. Sortir un détenu pour le présenter devant le juge pour qu’on lui prolonge son mandat de dépôt, ça pourrait être fait en visioconférence. Il y a des mouvements qui sont faits qui pourraient être largement réduits. Comme on l’a fait pendant la crise du Covid. On balade trop les détenus et on met tout le monde en danger".

Hier aux alentours de 11 h, l’ensemble des surveillants pénitentiaires a observé une minute de silence en hommage à leurs collègues décédés dans l’exercice de leurs fonctions. Au même moment, magistrats, fonctionnaires, greffiers et avocats du barreau de Carcassonne faisaient de même au palais de justice.

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